Depuis que j’ai réussi à sortir de la spirale de l’angoisse apathique autour du « qu’est-ce que je vais faire de ma vie ? », je vis dans un bouillonnement créatif. Ce dernier n’est pas exempt d’angoisses (en même temps, j’ai l’impression que l’angoisse est collée à ma personne comme un vieux sopalin mouillé sur la peau), mais l’apprentissage, la curiosité et la stimulation intellectuelle les tiennent un peu à distance.
Pour être honnête, je me lève tous les matins en me disant des trucs comme :
« ça ne marchera jamais »
« ce que tu fais est sans intérêt »
« personne n’aura envie d’acheter tes dessins »
« si les gens dont tu dépends meurent, tu ne pourras pas te débrouiller toute seule »
J’imagine que si vous vivez avec l’anxiété, c’est le genre de pensées avec lesquelles vous êtes familier·es.
Puisque ces pensées sont là et que je ne peux pas les chasser, j’adopte la stratégie de la meuf pressée. En vrai, je n’ai pas le temps de les écouter : j’ai un programme quotidien, j’ai des to do lists à cocher (ça me satisfait beaucoup de cocher des to do lists), il faut qu’à 9h j’aie terminé ma routine lecture/écriture du matin pour pouvoir faire du yoga et acheter le pain avant de me mettre au travail à 10h. Bref, ma vie bien organisée avec des petites plages de couleurs différentes dans mon agenda numérique.
Je crois que je n’avais jamais réalisé, avant d’écrire ces mots, à quel point j’étais une personne angoissée et à quel point mon côté routinier était une stratégie d’évitement contre les pensées envahissantes1, en tout cas c’est plutôt efficace.
Quoi qu’il en soit donc, tous les matins, je ressasse quelques minutes dans mon lit et puis je fais des trucs : je suis des cours en ligne sur le marketing, je fais des recherches d’imprimeurs, je me renseigne sur les différents types de papier… J’apprends des choses qui me stimulent, qui me font penser que tout est possible et je termine en général la journée avec beaucoup plus de courage et de motivation que je ne l’ai commencée, c’est plutôt pas mal.
De l’écriture et des exercices
Dorénavant je consacre mon début de semaine aux tâches liées à l’illustration et à ma future boutique en ligne et le jeudi et le vendredi à l’écriture (et donc aux corrections des Mirages d’Abalon). Je préfère pouvoir me plonger dans mon manuscrit deux jours de suite plutôt qu’un jour par-ci, un jour par-là. Ça me fait gagner du temps et c’est plus motivant, même si je n’avance pas très vite.
Vu mon rythme, il est certain que je n’aurai pas terminé les corrections de ce tome 1 avant la fin de l’année. Depuis plusieurs semaines je galérais sur le chapitre 6 (que j’ai finalement terminé cette semaine !) et suite aux retours de Claire je dois maintenant revenir sur les chapitres 2 et 5 pour rendre plus crédible l’élément perturbateur de l’histoire de Géryl. J’espère que ces modifications ne me prendront pas trop de temps, mais je sais de toute façon que plus le temps va passer, plus la réécriture sera complexe puisque, pour certains chapitres, elle tiendra plus d’un deuxième jet que de corrections. Ce n’est pas grave. Je préfère faire les choses bien plutôt que bâcler le processus à cause d’une deadline arbitraire.
J’aime toujours mon roman, j’aime toujours le corriger et passer du temps dessus me plaît. À chaque fin de semaine, lorsque je reprends le manuscrit où je l’ai laissé, il me faut un petit temps de mise en route, mais passé ce délai, je suis ravie de retrouver mes personnages et d’améliorer jour après jour leur histoire.
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Toute cette organisation très carrée est donc positive, mais je suis quand même un peu frustrée d’écrire si peu. En réalité je n’écris pas peu du tout puisque je publie un article de blog et une lettre par semaine, j’écris dans mon journal tous les matins et j’avance sur le manuscrit de mon roman deux jours par semaine, mais j’entends par là que ma vie en ce moment manque un peu d’écriture créative instantanée.
Partant de ce constat et me disant que je n’étais peut-être pas la seule dans cette situation, j’ai décidé qu’à partir du mois de janvier, je vous proposerai en complément de cette lettre, un exercice d’écriture rapide (10 à 20 min) accompagné du texte que j’aurai moi-même pondu à partir de mes propres instructions. Cette proposition ne sera accessible qu’aux personnes souscrivant un abonnement payant, mais j’hésite encore sur le rythme de publication (entre une fois par mois ou toutes les deux semaines). Je suis en tout cas très enthousiaste et impatiente de commencer à imaginer des exercices et j’espère que vous serez nombreux·ses à vous lancer ce petit défi d’écriture personnelle.
Quand on est embourbé·e plongé·e dans un projet d’écriture au long cours comme un roman, on peut avoir tendance à négliger les petits exercices pratiques (je suis la première à le faire) alors que c’est justement par l’expérimentation sans enjeu que l’on débloque des choses et que l’on progresse dans son écriture. L’exercice des poésies de lecture m’avait par exemple beaucoup apporté et il faudrait d’ailleurs que je m’y remette. C’est la même chose avec le dessin : nombreux·ses sont les artistes qui tiennent un carnet de croquis pour expérimenter en parallèle de leurs œuvres principales dans le style pour lequel ils et elles sont reconnus (et l’oignon ci-dessus est d’ailleurs un exercice avec un autre médium que celui que je pratique d’habitude).
Ce n’est qu’assez récemment que j’ai commencé à voir l’intérêt des ateliers d’écriture, y compris pour les personnes qui écrivent déjà beaucoup au quotidien et qui n’ont pas de mal à se discipliner pour le faire. De la même façon que chaque individu a sa propre façon d’écrire, chaque écrivain·e a aussi sa propre façon de concevoir des exercices autour des choses qui lui semblent intéressantes et pertinentes. Ainsi chaque proposition est unique et potentiellement déstabilisante, ce qui est super intéressant pour nous faire travailler des textes vers lesquels on n’irait pas en temps normal.
Bref, j’espère que vous serez intéressé·e par cette proposition et je vous remercie de m’avoir lue cette semaine. Je vous remercie d’ailleurs de me lire semaine après semaine depuis bientôt un an, vos petits messages et commentaires me disant que je suis votre petit rendez-vous rituel du dimanche me font très plaisir.
À dimanche prochain.
Sur le blog cette semaine
Notez que c’est aussi efficace contre les dépressions politiques à cause de la montée des fascismes.